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15 septembre 2010 3 15 /09 /septembre /2010 13:08

Joseph_Roth_Cafe_Tournon.jpg

J’arrive à l’Hôtel Savoy à dix heures du matin. J’étais décidé à me reposer quelques jours ou peut-être une semaine. C’est dans cette ville que vit ma famille, — mes parents étaient de Juifs russes. Je voudrais obtenir des subsides pour continuer ma route vers l’ouest. Je reviens de captivité ; prisonnier de guerre pendant trois ans, j’ai vécu dans un camp de Sibérie, j’ai parcouru des villages et des villes russes comme manœuvre, journalier, gardien de nuit, porteur et aide-boulanger. Je suis vêtu d’une blouse russe que quelqu’un m’a offerte, d’un pantalon court que j’ai hérité d’un camarade décédé, et chaussé de bottes encore utilisables, dont j’ai moi-même oublié la provenance. Pour la première fois depuis cinq ans, je me trouve à nouveau aux portes de l’Europe. Joseph Roth, Hôtel Savoy, traduction de Françoise Bresson, Gallimard, 1969.

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commentaires

L
<br /> Ca alors! Je viens d'acheter chez Gisela plusieurs livres, dont "les Fausses Mesures" de Joseph Roth, que je ne connaissais pas. Que c'est joli, des éditions Sillage... J'aime beaucoup la<br /> couverture.<br /> Sur la quatrième de couverture, je lis "il meurt dans la misère à Paris en 1939".<br /> Mais toi, je suis sûre que tu connais ce livre. Tu connais tous les Joseph Roth, tous les Robert Walser. Une des raisons qui me font t'aimer.<br /> Et Thomas Bernardt ? Est-ce que tu l'aimes aussi beaucoup ?<br /> <br /> <br />
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Une Petite Rue D’angoulême

  • : le ciel au-dessus de la rue
  • : petites proses journalières, citations, musiques, ou bouts de films.
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il devient écrivain

strindberg-copie-1.jpg

« Toujours allongé sur son canapé, il se sent pris d’une fièvre inhabituelle et tandis qu’elle se poursuit dans son corps, sa tête travaille à mettre en ordre d’anciens souvenirs, à élaguer certaines choses et à en rajouter certaines autres. De nouveaux personnages secondaires se présentent, il les voit se mêler à l’action, il les entend parler. C’est comme s’il les voyait sur la scène. Deux ou trois heures plus tard il avait une comédie en deux actes toute prête dans la tête. C’était un travail à la fois douloureux et voluptueux, si on pouvait appeler cela du travail, car cela se faisait tout seul, sans l’intervention de sa volonté et sans qu’il y fût pour rien. Mais à présent il fallait l’écrire. La pièce fut achevée en l’espace de quatre jours. Il allait et venait entre son bureau et le canapé où, par intervalles, il s’effondrait comme une loque. » (August Strindberg)

valentine

renee-2-copie-2.jpg

Ma grand-tante s’appelait Valentine. Elle vivait en solitaire à Fontbouillon, une campagne reculée, perdue, elle vivait ? — c'est un bien grand mot, je crois que je devrais plutôt dire qu’elle rêvait. Chaque jour elle s’habillait très élégamment, comme si ç’avait été un dimanche. Elle sortait peu. Elle regardait simplement la petite route qui passait devant sa porte, — où aurait-elle pu aller ? Les maris étaient morts depuis longtemps et son fils s’obstinait à vivre dans sa folie. Valentine s’asseyait à son piano et jouait ses nocturnes. La vie de Valentine est un immense, cruel et déchirant nocturne. Il y a longtemps que je pense à écrire le roman de sa vie absente. Fleur fanée d’un souvenir lointain et douloureux.

en voyage

KafkaMan

On arrive sur la grande place dès les premières heures, et tout est encore dans le tendre déploiement du rêve ; le jour est plus que le jour, — et la nuit moins que la nuit. Les pigeons égrènent la ponctuation subtile et mouvante de leur tourbillonnante quête d’horizons. Le ciel descend au milieu des murs, et les jeunes ombres s’étirent derrière les fenêtres. On est devant les vieilles procuraties, et le cœur s’absente de soi-même. On devient le voyageur de son désir — étranger au pays de ses errances.

l’écriture

wassermann

Il faudrait calculer le secret rapport entre la main et la pensée, — je ne suis pas sûr non plus que ce soit la pensée qui s’avance jusque dans la main, — c’est autre chose, peut-être simplement l’élan, la mise en mouvement de ce rapport justement, qui reste suspendu dans le fil courbe de la plume, et la respiration viendrait de ce qu’il faut tout de même, de temps en temps, tremper la plume dans le lac sombre de l’encrier. Peut-être les pensées sont-elles justement tout au fond dans l’encrier ? petites sirènes d’argent.